Archives 2024

Novembre obscur

Rédigé par Nathalie Legrand - - Aucun commentaire

« Bonjour, c’est J., le staff a décidé d’avancer votre rendez-vous du 13 au 07 c’est possible pour vous ? ».
« Oui c’est possible pour moi ».
Le lendemain une autre personne me demande de décaler ledit rendez-vous, me propose deux créneaux, je choisis le plus proche. Le 05 à 15 h 45. Une fois l’impression dissipée d’être, encore une fois, un pion sur l’échiquier de leur organisation, mon esprit, jusqu’au plus profond de mon sommeil, échafaude mille raisons en sable pour justifier les revirements. Aucune ne survivra à mon inquiétude. Le mercredi, le médecin nous reçoit avec une heure de retard nullement flagellée d’excuses.
À peine assis, il m’affirme bien plus qu’il me demande que mon retour à domicile s’est bien passé s’exonérant sans doute de possibles plaintes de ma part, et commence ensuite la lecture sur son écran du résultat de l’analyse de la tumeur, s’arrête au milieu d’une phrase, se retourne, fouille dans une maigre pile de feuilles, sort du bureau chercher le compte-rendu complet, revient, expédie la bonne nouvelle que les ganglions sentinelles ne sont pas cancéreux avant de me dire qu’une « reprise de berges » est nécessaire. En termes plus communs, je dois « repasser » sur le billard afin qu’il prélève plus de matières autour de la tumeur précédemment retirée.

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Octobre noir

Rédigé par Nathalie Legrand - - Aucun commentaire

Ça pue Nathalie, ça pue. Une petite voix dans ma tête me crie la formule aussi fort qu’une autre moins tenace se défend bec et ongle pour l’anéantir. Les trois mots s’incrustent, ils tapissent mon esprit dans les allers-retours entre la machine et le vestibule aux dimensions d’un placard. La suite est floue. Une échographie, des visages compatissants, mon pull à rayures blanc et bleu que j’enfile sans réfléchir, deux silhouettes blanches au bout du couloir sombre que je parcours les yeux cloués au sol, ma peur livrée à Gilles, l’échange aussi court qu’étouffé entre deux secrétaires, la salle d’attente désertée, ma gorge sèche, des regards gênés. Ils m’évitent. Une semaine et un jour plus loin, le rendez-vous pour une biopsie est fixé. 8 heures du matin. 8 heures, c’est bien, c’est tôt, ça ne laisse pas le temps de penser.
Certains intervalles d’avec ce jour s’effacent, ceux de mes pleurs inondant l’ordinaire demeurent. L’examen se déroule sans encombre, on me demande si je n’avais pas senti le nodule avant la mammographie. Non, je n’avais rien ressenti. L’interrogation trop de fois répétée m’exaspère, elle me fait passer le temps de son énoncé du banc des victimes à celui des accusés.
 

 

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